mardi 18 décembre 2012

Vieille rengaine.....



Le Syndrome de Peter Pan


C’était hier qu’j’passais mon bac,
Il arrive pourtant sans peine,
Je veux parler là du cap
Bien connu de la trentaine.
Je n’ai jamais grandi,
Je n’ai jamais mûri,
Presque trois décennies,
Que je suis dans mon nid.

Dans ma petite chambre d’ado,
Y a plein d’posters, de photos.
Led Zeppelin est tout en haut,
A côté de Manu Chao.
Pas moyen que je la vire,
Mon affiche de « I like beer »,
Et quand j’essaie de dormir,
Je ne vois que Richard Gere…..

Papa, maman, faut qu’vous soyez au courant :
Il paraîtrait qu’j’suis atteinte du Syndrome de Peter Pan.
Pour plus m’avoir dans les pattes, ben il va falloir vous battre,
Car ce n’est pas (pour) demain, que je vais me prendre en main.

Je suis de la génération
Des enfants de la Télé,
C’est avec adoration
Que j’ai chaque jour regardé
Téléchat et Sans Famille,
Les Cat’s Eyes ou bien encore,
Les Mondes Engloutis, Candy,
Les Merveilleuses Cités d’Or

C’est normal, me direz-vous :
On en était fan aussi !
Oui mais bon ce n’est pas vous,
Qui avez encore aujourd’hui,
La collection des Thorgal
Et le Marsupilami.
J’ai bien un problème mental,
Puisque ce sont mes seuls amis.

Papa, maman, faut qu’vous soyez au courant :
Il paraîtrait qu’j’suis atteinte du Syndrome de Peter Pan.
Pour plus m’avoir dans les pattes, ben il va falloir vous battre,
Car ce n’est pas (pour) demain, que je vais me prendre en main.

Avant d’aller au boulot,
Maman m’prépare mes vêtements.
Et puis j’ouvre le frigo,
Prendre le pique-nique qui m’attend.
Je suis une vraie pique-assiette,
La reine d’la boîte à tartines.
Et le reprisage des chaussettes,
C’est maman qui s’le coltine.

En 25 ans de métier,
Je n’ai jamais débarrassé,
La table du p’tit déjeuner,
Et encore moins le plancher.
Je suis une vraie lavette,
Mais je ne suis pas dans la dèche,
Car je suis loin d’être bête,
C’est le moindre effort que j’prêche.

Papa, maman, faut qu’vous soyez au courant :
Il paraîtrait qu’j’suis atteinte du Syndrome de Peter Pan.
Pour plus m’avoir dans les pattes, ben il va falloir vous battre,
Car ce n’est pas (pour) demain, que je vais me prendre en main.

Et oui j’refuse de grandir,
J’ai la tête dans les étoiles,
Que la nuit je regarde luire,
Au plafond d’ma chambre postnatale.
Je refuse d’évoluer,
Et j’ai la tête à l’envers,
Quand je m’retiens par les pieds,
Au trapèze de l’espace vert.

Je vis ma vie en musique,
Loin de toute réalité,
Ma maladie est chronique,
Celle qui m’en fait décoller,
Je rêvasse, je tourne en rond,
Je glandouille, j' suis brouillon.
Je suis d’celles dont les mots sont :
« Dessine-moi un mouton. »

Papa, maman, faut qu’vous soyez au courant :
Il paraîtrait qu’j’suis atteinte du Syndrome de Peter Pan.
Pour plus m’avoir dans les pattes, ben il va falloir vous battre,
Car ce n’est pas (pour) demain, que je vais me prendre en main.

(Paroles d'une chanson écrite à 25 ans. Comme quoi.....)

lundi 10 décembre 2012

Lettre ouverte à Saint-Nicolas




« Ô Grand Saint-Nicolas,

C’est Perrine Pan. Oui, encore moi. Je sais, ça fait 31 ans que vous vous farcissez mes missives, 31 ans que vous les refilez à Père Fouettard et à sa team de RP pour qu’ils me répondent de leur plus belle plume d’autruche une réponse un tant soit peu personnalisée parce que vous, vous avez assez à faire avec la gestion de votre entreprise de divertissement. Mais que voulez-vous ? En tant que Saint-Patron de tous les n’enfants, vous êtes et serez toujours mon maître à penser, à moi, l’archétype même de l’« enfulte » - pardonnez-moi au passage cette expression douteuse que j’exècre mais qui me résume si bien. Chaque année, vous remportez sans surprise le titre de « Person of the Year » de mon petit classement personnel, où je suis certes le seul juré. Et sans vouloir heurter le saint homme d’Eglise que vous êtes, à côté de vous, Johnny Depp et Julien Doré n’ont plus rien à foutre dans mon top des « Hommes que si ils étaient dans mon lit, je dormirais pas dans la baignoire. »  Ben oui, j’ai vu quelques vitraux de vous jeune, et je ne peux que constater que vous portiez (déjà) la barbe à merveille, faisant ressortir l’éclat azur de vos yeux, du temps où vous n’aviez pas encore délocalisé votre activité sur les hauteurs. Pour peu que vous osiez voler sur les platebandes de Santa Claus, en exportant votre image Outre-Atlantique, je suis sûre que vous arriveriez à faire de la crosse un must have, et de la cape l’accessoire swag de la collection automne hiver du Men’s Vogue. Non, je n’ai jamais cessé de croire en vous, malgré le délit d’initiés de certains de mes camarades de classe, malgré l’aveu fait ensuite de la bouche même de mes parents. Années après années, décennies après décennies, se sont succédé devant l’âtre mes souliers Aster, Hush Puppies, Kickers, Dockside, Airwalk, Converse, Dr Martens, Chipie, Bensimon, Adidas et Isabel Marant. Bref, 31 ans d’une absolue dévotion à votre culte, d’une groupie attitude sans faille. Sauf que.

Sauf que maintenant, je suis maman. Et donc, dans vos petits papiers. Et j’avoue que ça me met un peu dans mes petits souliers, moi, d’être dans vos petits papiers. Rassurez-vous, il n’est pas question ici de vous blâmer. Comme il ne me viendrait pas à l’idée de blâmer Dieu pour les atrocités commises en son nom. Non. Je sais que vous faites de votre mieux, et qu’avec la population mondiale qui ne cesse de croître – et ce même si votre activité ne s’étend que sur le territoire du Bénélux - , vous avez été obligé de renoncer à la facture entièrement artisanale de vos joujoux. Victime de votre succès, vous avez du faire appel à des collaborateurs qui ont pour nom Fisher-Price, Playskool, Disney, Lansay et autres Bandaï. Les pages roses de nos quotidiens ont même parlé à une époque d’une O.P.A qui aurait été faite par Mattel sur la petite entreprise « Niklaas & Fouettards ». Mais vous n’y pouvez rien, vous. En ces temps de crise, si vous voulez continuer à combler de bonheur vos petits moutons, il vous faut vous aussi suivre le troupeau de la mondialisation. Et puis vous n’avez plus 1020 ans, quand même. Vous êtes toujours dans le Conseil d’Administration, mais n’exercez plus vraiment, je me trompe ? On dit que c’est  votre âne qui aurait repris les rennes de la boîte. Mais attention, Saint-Nicolas, car je ne pense pas que le nouveau boss aux dents longues soit têtu au point de boucher ses grandes oreilles quand viennent y siffler les sirènes du merchandising. Bon, je vous vois déjà en train d’ajuster vos lunettes en demi-lunes et de souffler à l’oreille de votre associé à béret : « Je ne comprends pas un traître mot de ce que me raconte cette jeune dinde ….. » Aussi je vais parler concrètement.

Lundi passé, soit quelques heures avant votre passage dans les foyers, j’avais pris congé afin d’aller me fournir chez vos collaborateurs pour offrir à mes filles un 6 décembre digne de ce nom. Comme les heures et les sous sont comptés dans la vie d’une mère de famille limite « Mompreneur » comme moi, je me suis dit que j’allais tout miser sur une grande enseigne au logo jaune et bleu. Vu la taille du commerce, je ne devrais avoir aucun mal à trouver le meilleur rapport qualité-prix en matière de jouets, moi qui suis loin d’être la mère 100% BioBobo qui ne jurerait que par les jouets en bois transporté en paquebot depuis des forêts écologiquement propres, avant d’être enduit de cire d’abeille made in Thorembais-les-Béguines. Naïve que j’étais !! Ca a commencé par une sensation d’écoeurement, à peine le portique d’entrée franchi. Et là je ne vous parle même pas des sapins de Noël ornant prématurément les rayons, à semer la confusion la plus totale chez les enfants de maternelle qui peinent déjà à différencier le lundi du mardi sur le calendrier de leur classe. Non. Je fais plutôt allusion à cet étalage de couleurs saturées accentuées par la matière plastique qui les arborent. Et à ce clivage au sein de celles-ci. Fushia, mauve et rose Barbie pour les rayons « fillette » ; bleu, kaki et rouge pour les rayons « garçon », histoire d’être sûr de ne pas se tromper et d’offrir malencontreusement une montre  Ben10 à la petite dernière, au risque d’en faire une future gwin à mèche. Oui, aujourd’hui, force m’est de constater que les jouets ont un sexe. Mais ce n’est pas encore là le nœud du problème. Ce qui me pose réellement question,  c’est plutôt le concept d’estampillage, voire, pour employer un terme plus adéquat, de merchandising. En effet, plus moyen de retrouver un jouet figurant sur la liste de ma jeune Padawan qui ne soit griffé Disney (Cars et autres Disney Princesses), Barbie ou Dora l’usurpatrice (1500 produits dérivés il y a déjà quelques années, je ne sais pas où elle en est aujourd’hui). Pas moyen de trouver un Memory ou un jeu de dominos qui ne soient complètement neutres. Ravensburger aurait lui aussi vendu son âme d’enfant aux pontes de la grande consommation. C’est là que j’entends déjà certains lecteurs me demander où est le mal, les studios Disney véhiculant après tout des valeurs judéochrétiennes des plus louables. Bon, on ne va pas revenir sur le passé trouble du vieux Walt, au risque, pour certains, de briser un mythe. Ni sur l’hypersexualisation et les mutations improbables des héros de Perrault et Grimm que j’ai pu constater en tombant sur une Barbie-Blanche-Neige en décolleté improbable et mini-jupe ras des l’touff tout ce qu’il a de plus médiéval, au risque de passer pour une vieille ringarde. Par contre, loin de moi la volonté de faire de la récupération, mais ce qu’on peut plus légitimement dénoncer, ce sont par exemple les conditions de travail des ouvriers chinois qui fabriquent les jouets du groupe Mattel, auquel appartient Disney (voir : http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=riIisBDVU_E). Bon, bon, je sais, c’est comme ça partout et c’est comme ça pour tout. Les fringues, les meubles, les ordis. Si on veut consommer éthique, on doit être plein aux as. Mais bon, ça se doit quand même d’être dit, non ? Enfin, dernier chef d’accusation à l’encontre de ces marques : la manipulation des prescripteurs d’achat que sont nos chères petites têtes blondes. Un dessin animé fait un carton ? Hop, on en dérive quelques produits, on en fait la pub massivement sur la chaîne où passe le dessin animé afin que l’enfant identifie bien le packaging et le retrouve aisément dans son catalogue Dreamland (heureusement qu’il ne sait pas lire, ce serait beaucoup trop easy pour lui de découvrir le pot-aux-roses) et dans le magasin (si le parent a le malheur de faire les courses avec son rejeton….). Là non plus, je ne vous apprends rien, mon bon Saint, mais moi, quand ma fille découvre le jouet tant désiré parmi vos présents et qu’elle se met à en entonner la ritournelle de la pub télé, en la ponctuant du slogan de la marque, ça me fait un peu mal à mon esprit critique. Oh, j’en aurais encore des reproches à adresser à vos collaborateurs, Saint-Nicolas, comme l’insécurité des jouets, constitués d’un nombre incalculable de produits chimiques à rendre stérile l’ouvrière qui les fabrique, et qui n’aura donc pas à se poser la question de savoir comment offrir des jouets à son propre enfant, avec les 0,8% de leur prix de vente alloués à son salaire. Quant à savoir ce qui se passera dans la bouche de la petite Lilou lorsqu’elle les lapera, de qui est-ce vraiment le problème, finalement ? A part le sien et celui de ses parents ? Et puis fourt’, ceux-ci n’ont qu’à se fournir uniquement aux Idées Bleues ou chez Woodtoys, et tant pis si ça les fout sur la paille, et qu’ils seront obligés de terminer le mois en bouffant le collier de pâtes reçu à la dernière fête des mères. Mais encore une fois, je ne voudrais pas faire de la récupération.


Et puis je sais ce que vous allez me répondre, mon bon Saint-Nicolas : « Mais  Perrine, à ton époque, c’était toudi l’même. Souviens-toi quand je t’ai offert la peluche Bébé Schtroumpf, à la sortie de l’album éponyme, ou celle du Marsupilami, alors que tu raffolais de ses aventures en Palombie. Et tes Popples, et tes Bisounours, tu les croyais sortis de la cuisse de Père Fouettard ? » Oui, c’est vrai, vous n’avez pas tort. Peut-être que je suis trop psychorigide. Mais voilà, je voulais juste souligner ça avec les marqueurs Raiponce 100% washable de la petite Oompa Loompa.

Malgré tout, je vous souhaite une bonne tournée, Saint-Nicolas. Vous n’avez pas baissé d’un cran dans mon estime. Je vous laisserai la nuit du 6 décembre une carotte Bio et un verre d’Orval pour la route. Merci de ne pas emporter ma paire de Nike (ben oui, faites ce que je dis, pas c’que je fais…..).

Vous souhaitant bonne réception de la présente ainsi qu'une excellente Fête de vous-même, je vous salue bien cordialement.

Amitiés à Père Fouettard et à l’Ane.
  
Perrine Pan.

Envoyé de l’IPad Kid’ de la jeune Padawan.  (J’espère que vous avez du réseau là-haut.) »




Autres Liens :

Enquête sur les fabricants de jouets et leur (non) éthique, et pétition :




Faut-il interdire la publicité aux enfants ? (Questions à la Une) :


 http://www.dailymotion.com/video/xfrdxr_publicite-faut-il-interdire-la-publicite-aux-enfants_school

dimanche 25 novembre 2012

Episode XXVI : Les Titres Service, Part 1


Ca y est. Monsieur Hulot a décidé de franchir le cap. Il me l’a annoncé tout-de-go, en rentrant du boulot lundi soir. Non sans avoir eu le temps de se viander en posant le pied sur la locomotive Playschool de la petite Oompa Loompa, avant d’atterrir tête la première dans une manne à linge débordant de slibards et autres fringues non-repassées. Essayant de retrouver son sang-froid en même temps que son Blackberry qui s’était fait la malle lors du vol plané le moins resplendissant de l’histoire de la figure aérienne, il me dit : « Bon, Perrine, c’est plus possible. On bosse tous les deux comme des malades, au Diable la conscience judéochrétienne, prenons une femme de ménage !! C’est ça où tu n’auras plus jamais à repasser mes chemises, vu que je ferai mes valises. T’étais djà pas la reine du rangement quand t’étais au chômage et sans enfant, mais maintenant notre rez-de-chaussée frôle la zone sinistrée. S’il te plaît, pense à la sécurité de ta famille et téléphone demain aux « Petites fées du logis ». » Sur le coup, j’ai trouvé ces réclamations légèrement gonflées, de la part d’un homme qui chaque matin fait de la spéléologie au saut du lit pour retrouver le réveil hurleur  sous la pile de chaussettes qu’il met un point d’honneur à élever un peu plus chaque soir, à l’heure de se déshabiller. Mais bon, force m’était de constater qu’il n’avait pas tort. L’autre soir encore, on était passé à deux doigts de la catastrophe après que notre jeune Padawan ait transformé notre four en banc solaire à Barbies. Après y avoir laissé la majeure partie de sa célèbre chevelure, Barbie Raiponce a fait place à Barbie Desireless, et ma quiche au saumon qui avait déjà de fortes chances d’être immangeable a viré carrément toxique.

Le mardi matin, les fesses à peine posées sur ma chaise de bureau, je composais le numéro des « Petites Fées du Logis » - société dont le nom n’a rien à envier à ceux des DVD préférés de mes filles, labellisés Colruyt Entertainment - sous le regard torve de Lou-Anne. Elle qui ignore encore qu’Hoover n’est pas que l’ancien nom d’un groupe belge et que Black & Decker n’est pas une marque de Vodka,  n’attendit pas que j’eus raccroché avec la fée en chef pour ricaner, avant de me lancer : « Alors, on s’embourgeoooiiisssee ? » C’est là que je perdis totalement mon sang-froid. Insinuer que j’en touche pas une, moi qui me tape une dermatite de la ménagère permanente à force de tremper mes menottes dans des bains de Dreft (mensonge : on ne lave pas de quoi dresser une table de 50 personnes avec une goutte de Dreft, et bien que j’ai la place d’installer à tout casser 8 convives dans ma salle à manger, j’utilise le double du célèbre savon vaisselle à chaque repas festif!!), moi qui pourrais me faire tatouer sur le torse la carte de mes canalisations - si toutefois cette idée n’était pas totalement grotesque et tue-l’amour –, moi qui ai les genoux cagneux à force de me pencher pour faire la poussière sous mon Ektorp….. 

jeudi 15 novembre 2012

Episode XXV: Là où il est question du (parent) trentenaire, de son flantisme, de sa phobie du vendredi et d'une soirée 90's


Souvenez-vous. C’était il y a une quinzaine d’années. Vous étiez ado et mal dans votre peau. Toute la semaine, vous deviez vous farcir 7 heures par jour derrière les bancs de l’école. Alors le vendredi, c’était sacré. A moins d’avoir booké un baby-sitting, vous passiez rarement la première soirée du weekend devant la télé. Et il aurait fallu vous payer pour rester à regarder Apostrophes avec vos parents. Non, le vendredi, c’était soirée mousse à gogo, ou autre improbable message party.

Souvenez-vous, c’était il y a une dizaine d’années. Vous étiez étudiant et bien dans votre peau. Toute la semaine, vous étiez dans l’obligation de guindailler. Le lundi, vous vous rouliez dans la fange à la Jefke. Le mardi, vous vomissiez au Cesec. Le mercredi, vous rouliez des pelles aux soirées de l’Ihecs. Le jeudi, vous vous saouliez au ciné club de l’IAD. Alors, quand arrivait le vendredi, vous n’aviez plus qu’une seule aspiration: somnoler dans le canapé à côté de vos parents, en matant Thalassa.  


Souvenez-vous, c’était vendredi passé. Vous êtes aujourd’hui un trentenaire semi-bien dans sa petite vie. Toute la semaine, vous avez bossé. Mais pas que. Le lundi, vous avez conduit votre fils au judo et votre fille à son cours de danse. Le mardi, vous avez fait quelques heures supp’ avant votre séance de psy. Le mercredi, c’était piscine pour tout le monde. Le jeudi, vous vous êtes fait plomber une molaire chez votre vieux dentiste libidinal, avant de rejoindre, à la bourre, une réunion de parents. Alors, le vendredi, vous vous retrouvez avec l’énergie d’un cheval de trait pensionné et avec le même engouement pour la dancefloor que celui de Donna Martin dans l’épisode de BH où elle porte un déguisement de sirène au Bal de Promo. Vous êtes tellement soumis au dictat de votre filofax - oui, un filofax, c’est overnineties et c’est pour ça que vous avez toujours le vôtre, incorrigible nostalgique que vous êtes-, que même en matière de festivités, vous procrastinez. La débauche, ça sera pour demain. Oui, pour le trentenaire, le vendredi, ça pue, le samedi, c’est swag. Et ça ne lui laisse plus qu'un soir pour ses sauteries diverses et variées. 


Mais moi il faut qu’on m’explique. Ben oui, ça m’échappe. Quoi ? Vous pensez sérieusement qu’après avoir conduit votre mouflet à sa réunion baladin, fait une virée chez Brico pour trouver LA poignée de porte de cuisine idéale, repeint le meuble hérité de votre chineuse – et j’insiste sur la quatrième lettre – de belle-m’, attendu votre commande à la beenhouwerij, être passé au car wash, et avoir enfin récupéré votre Baden Powell en puissance - qui aura tôt fait de recrotter votre intérieur cuir une fois qu’il y aura déposé ses bottes Aigle et les mottes de boue qui y sont inévitablement accrochées en ce mois de novembre -, vous aurez la fraîcheur d’un gardon et serez prêt à vous ruer sans plus attendre chez Madame Moustache ou chez Mr Wong, pour une folle soirée bobo ? Oui, j’avoue, j’ai du mal à comprendre cette phobie du vendredi qui semble frapper le trentenaire, surtout lorsqu’il devient parent. La semaine passée encore, j’ai vécu un grand moment de solitude adulescente alors que je tentais de composer un petit groupe festif pour participer à la désormais culte God save the 90’s . Je pensais susciter enthousiasme et cris de joie chez les destinataires de mon mail à la réception de celui-ci, et qu’est-ce que je reçus à la place ? Oui, qu’est-ce que je reçus, Madame ? Des excuses. Par milliers. Un flot d’excuses. Une chiée d’arguments à faire tomber la toge du plus véreux des avocats. « Non Perrine, je ne peux pas, je suis en weekend en Alsace avec la famille d’Arnaud - « Tu l’as toujours pas largué ce plouc ? », « Non Perrine, je ne peux pas, ma babysit est en blocus. »  - « Et les grands-parents, c’est pour les chiens ? » , « Non Perrine, je peux pas rater 50 Degrés Nord, on y parle de la pièce de l’ex de la sœur de mon prof de tennis…. » - « Tu sais qu’aujourd’hui on peut encore enregistrer des émissions à la télé ? Tu peux même les voir sur internet. Et puis c’est pas comme si 50 Degrés Nord ça passait pas 23 fois par nuit » - « Non Perrine, tu comprends pas, enfin non, tu comprendrais pas. – « ? ? ». Mais les pires excuses sont encore celles qui sont sincères. Celles qui émanent de personnes courageuses qui ne se cachent pas lâchement derrière les membres de leur famille pour ne pas avoir à avouer leur absolu flantisme de trentenaire. Je reformulerais même : les pires refus sont encore ceux émis par ceux qui n’ont pas d’excuse, à part celle d’être mou du genou. Mais ça a le mérite d’être honnête, et assumé. « Ah non hein, moi, le vendredi, j’suis naze, un bain, une bouillotte et au lit. Mais on peut se faire une raclette samedi si tu veux. » – « Oh yeah, j’amène le Riesling et la tarte au flan. » Même Monsieur Hulot me laisse tomber : « Perrine, tu vis trop dans le passé, espèce d’enfulte malsaine. » Tant pis, j’irai à la soirée Nineties…. Avec la babysit. Et tant pis si elle était pas née à cette époque.

 

dimanche 28 octobre 2012

Episode XXIV : Le périnée de Perrine Pan


Oui je sais, je suis la championne des titres tue-le-glamour. Mais qui, je l’espère, ne manqueront pas de titiller les plus resquilleurs des zappeurs du net. N’est pas journaliste du Nouveau Détective ou d’Ici Paris qui veut, mais n’empêche. Je m’applique dans le choix de mes titres, qui sont au final, et au contraire des feuilles de chou précitées, généralement un reflet assez fidèle du contenu de l’article. Enfin, de l’épisode. Car c’est bien de cela qu’il est ici question : de tranches de vie, de couches d’une indigeste lasagne qu’est mon existence légèrement bordélique et borderline, dont je vous offre la dernière part.

Ah, j’entends déjà de jeunes lecteurs me signifier qu’il n’ont pas la moindre fucking idea de ce qu’est un périnée. Rassurez-vous Ryan, 17 ans, de Gosselies et Justin, 16 ans, de Vyle-et-Tharoul (ndlr : les benjamins de la Communauté Perrine Pan, que j’ai appâtés grâce à mon article sur les mères geek….), même si tout le monde est doté d’un périnée, il est normal d’ignorer son existence (et de s’en porter très bien) jusqu’à un certain stade d’avancement de la vie, soit à l’heure de devenir parents. De toute manière, réflexe universitaire oblige, je vais commencer par définir ce terme effectivement des plus barbares pour toute personne qui n’a jamais franchi la porte d’un cabinet de gynécologue, d’une salle d’accouchement, ou d’un centre de kyné. Selon le site perinee.info (siiiiii, ça exiiiiiiiste),  « Le périnée, pour faire simple, est un ensemble de muscles (nommé également muscle pelvien ou muscle de Kegel) sur lesquels repose le bon fonctionnement d'une certaine partie du bassin, il forme avec un ensemble le plancher pelvien. Ce muscle en se contractant permet notamment l'évacuation et inversement la conservation des urines et des selles en attendant la miction ou la défécation. Le périnée permet donc le maintien de la vessie, de l'urètre et du rectum. Chez la femme le plancher pelvien sert également de soutien à l'utérus. Ce muscle permet à la femme d'accoucher plus ou moins facilement. » Le tout agrémenté d’un délicieux schéma, que voici : 


Vous remarquerez que cette coupe franche est assez soft et de bon goût. Je vous épargne quelques illustrations plus trashouilles glanées lors de mes recherches sur Google, nettement plus réalistes et aux points de vue moins flatteurs. Bon, là, on est d’accord qu’il s’agit de l’anatomie féminine, mais comme je le disais plus haut, les hommes aussi, possèdent un périnée. Sarkosy lui-même a clamé haut et fort que Carla et lui se faisaient coacher pour bétonner leurs périnées. (Ssssiiii, c’est vrai, les détails ici : http://www.marianne.net/Sarkozy-ne-nous-cache-rien-meme-pas-son-perinee_a177974.html) Et preuve en image, une nouvelle fois (notez que ça a l'air sacrément plus complexe que chez la femme) : 
Ben oui, vu la définition précitée, imaginez ce qu’il se passerait si vous n’en étiez pas dotés, Ryan et Justin…. Bon, évitons que cet épisode ne s’engage une nouvelle fois dans des voies trop douteuses, et arrêtons là la partie définition. 
Mais pourquoi je vous parle de périnée, là, comme ça, dès-potron-minet, allez-vous me demander? Moi-même, j’avoue que je ne sais pas très bien….. Ah si ! Ca me revient ! L’idée m’est venue suite à une mésaventure vécue il y a deux jours à l’Ecole du Cirque. Oui, je sais, c’est complètement parent bobo-BW, c’est complètement jaja-new-age, mais j’ai commencé à suivre des cours de cirque.  Mais j’y reviendrai en fin d’article, car j’aime suivre une certaine chronologie. Donc, une fois que l’on tombe enceinte, on fait également connaissance avec cette partie du corps dont on n’avait jamais entendu parler auparavant, et qui dorénavant va devenir le centre d’attention non seulement de tous les professionnels de la naissance à qui vous aurez affaire, mais également de toutes vos connaissances féminines qui sont passées par là avant vous. Comme si l'on avait soudain accès à une des clefs du fonctionnement de l'univers, comme si c’était un truc réservé à des initiés, que l’on gardait tabou jusque-là, mais qui devient le sujet de conversation le plus commun une fois qu’on a (ou a eu) un polichinelle dans le tiroir. On a du coup l’impression de faire partie d’une sorte d’élite, d'une caste privilégiée face à tous ces pauvres aveugles qui ignorent encore qu’ils possèdent un périnée. Le jour où on vous révèle sa localisation, c’est un peu comme le jour où l’on vous apprend que Saint-Nicolas n’existe pas, mais que vous devez continuer à faire semblant d’y croire pour vos petits frères et sœurs. Et une fois que le mot est lâché, ça n’arrête plus. Tout au long de votre grossesse, on vous met en garde, on vous somme de le bichonner, au risque de vous retrouver incontinente. On vous conseille de le muscler, de le coacher, d’être à son écoute « Madame Pan, é-cou-tez ce que vous dit votre périnée !! ». Vous, vous êtes novice dans le milieu et vous n’osez pas trop contredire les sommités en blouse blanche qui s’occupent de votre bien-être. Alors vous acquiescez. Et vous retrouvez bien dépourvue le soir, dans votre salon, seule avec votre mystérieux périnée. Vous voulez bien l’écouter, mais force vous est de constater que le vôtre est aphone. Et pourtant, vous voulez leur faire plaisir, à votre gynéco et votre sage-femme, alors vous tentez tant bien que mal de faire les exercices recommandés devant le dernier épisode de Mad Men, en n’ayant en réalité pas la moindre idée de ce que vous êtes en train de foutre, mais avec toutefois ce petit sentiment jubilatoire éprouvé en regardant votre mari et en vous disant « S’il se doutait que je suis en train de muscler mon périnée, rhhi rhhi rhhi. ». Une fois l’enfant venu au monde, vous pensez que les tracasseries autour de cette partie de votre anatomie ont débarrassé le planchier pelvien. Naïve que vous êtes, c’est maintenant que les ennuis commencent, dès la première visite de la sage-femme. « Comment va votre périnée Madame Pan ? » « Ben, je ne sais pas, demandez-lui…. On a jamais beaucoup communiqué lui et moi… » Et c’est ainsi que la « femme qui murmure à l’oreille des périnées » vous remet une liste d’exercices à effectuer sans plus attendre (au risque de devenir et rester incontinente), comme si vous n’aviez que ça à foutre avec un nourrisson de quelques jours. « N’oubliez pas Madame Pan, c’est très important, hein !! 2 fois dix minutes tous-les-jours!!», dit-elle en refermant la porte de la chambre, avec un air de démence dans le regard. Information qui sera directement corroborée par ma voisine de chambre en vareuse du RC Wavre et pantoufles Tigrou: « Elle a raison hein, un accouchement ça te fout en l’air un plancher pelvien….. » Et vous n’avez pas encore fini d’en entendre parler. Ca continue lors de vos séances de kiné postnatale où on vous propose des massages du périnée ("Non mais ça va pas non !!") pour vous poursuivre lors de vos sorties mondaines que vous attendiez pourtant avec l’impatience d’un détenu de prison arrivé au terme de sa peine (même si votre geôlier est tout mignon et a des petites fesses qui sentent le talc). Moi, même les sorties d’affaires me réjouissaient. Et pourtant. Là où l’on n’imagine pas l’associé de son mari lui demander entre le carpaccio de rouget et l’entrecôte irlandaise comment se portent ses testicules, pour la femme de l'associé, il est visiblement de bon goût de s’inquiéter de l’état de fonctionnement de tous les périnées présents autour de la table qui auraient connu récemment un accouchement. C’est à dire uniquement moi, car pour une fois la plus jeune de l’assemblée au milieu de femmes cougars. Non mais c’est vrai quoi, on nous dit depuis tout petit qu’on ne peut pas dire « bite-couilles-nichon », mais par contre, sous prétexte que ça fait partie du monde enchanteur de la vie périnatale et que le terme est vaguement scientifique, il semble tout a fait bienvenu de s’inquiéter de cette partie intime de son hôte. Voire….grossier de ne pas le faire.
J’en arrive à ce dernier épisode. On me retrouve donc il y a deux jours à ma première leçon de cirque, toute enthousiaste à l’idée de passer 1h30 hors de la course infernale qu’est la vie de parent, 90 minutes de pur plaisir loin des tracasseries cafardeuses du monde des adultes. Un rapide coup d’œil  à mes convives me conforte dans cette idée. Mes collègues circassiens sont jeunes, frais, ils sentent encore bon le Clearasil. Me voilà entourée de post-ados, je n’espérais pas mieux. Et pourtant. Je faillis tomber de mon trapèze quand je l’entendis prononcer pour la première fois. J’avais beau être en cochon pendu, je l’avais bien entendu…. Je me redresse et tends l’oreille. Je ne rêve pas. La jeune fille sur le trapèze d’à côté s’adresse à la prof, qui lui confie ne pas pouvoir lui montrer les exercices car elle sort de son congé de maternité. Elle-même (la jeune fille) serait en plein allaitement. Et se demande si toutes ces figures acrobatiques ne vont pas endommager….son périnée. Du haut de mon trapèze, j’observe alors plus consciencieusement le petit groupe. Et j'essaie de capter au vol des bribes de conversation. J’entends parler couches, j’entends parler crevasses, j’entends parler biberons sans bisphénol. Ma parole, j’hallucine, dites-moi que c’est là le tour d’un illusionniste mal intentionné!! Tous ces gens ont mon âge. Je suis entourée de périnées. De périnées jongleurs, de périnées funambules, mais de périnées tout de même……