mercredi 2 juillet 2014

Episode XXV: ANTIFOOTEUX: les 5 arguments qui ne tiennent pas la route (où Perrine Pan(ini) ne plaisante plus)

En guise de carton jaune: 

Oui, je sais. Je risque de ne pas me faire que des copains, sur c’coup (d’pied’but)-là. D’achever de me faire détester par les antimundialistes avec qui je me crêpe le chignon depuis deux semaines. Et de me faire traiter d’opportuniste crasse qui surferait sur la brazilian wave pour reconquérir un lectorat en constante baisse, baisse qui pourrait s’expliquer par le fait….ben qu’en fait je n’écris plus. MAIS JUSTEMENT !! JUSTEMENT !! Allez savoir pourquoi, la victoire de nos Diap’s me fait pousser des ailes et me donne comme une irrépressible envie de reprendre la plume pour voler à leur défense (de zone). Oui, je sais, ce n’est pas le (tir au) but de ce blog de parler ballon rond, ça peut paraître hors-sujet (voire hors-jeu), en même temps, que de liens peuvent être établis entre le foot, la Coupe du Monde, et l’adulescence. Puisqu’il s’agit de défense, je reprendrai un à un les arguments et autres commentaires de l’accusation, pour y apporter un nouvel éclairage du à une vision probablement très naïve du phénomène. Et promis, je fais sortir illico Stéphane De Groodt  de mon corps.

1° « Tu trouves ça normal ces gens qui votent NVA ou blanc, mais qui depuis le 12 juin dégainent leurs drapeaux belges ? »

D'une certaine manière oui, c'est une forme de patriotisme spontané qui ne pète pas plus haut que son cul et sur laquelle je ne vois pas pourquoi il faudrait cracher. Je n'ai pas une bonne vue de Flandre (et là mea culpa), je ne sais pas si ces gens sont hypocrites ou se sont laissé surprendre par la fougue footballistique au point de troquer le drapeau au lion contre celui du pays. Quoiqu’il en soit, les élections dépriment les Belges, ils n'y croient plus et sont désenchantés, alors que la Coupe du Monde les euphorisent. Tant mieux si cette occasion fait d’eux des larrons un peu cons, et les unit dans la connerie. Comment ne pas être un peu "ému" de les voir se fédérer à ce point? Même dans le fin fond du moindre bled fleurissent des drapeaux tricolores, de manière libre et positive, et non comme un tentative désespérée de sauver un pays qui s'écroule. Pourquoi ne pas se réjouir de voir les Belges sortir les drapeaux non pas parce qu'ils sont désespérés mais parce qu'ils sont fiers? Cette euphorie est peut-être un peu niaise mais elle est spontanée et contagieuse et ça c'est bon. Et j'ajouterais que justement, contrairement aux votes électoraux, supporter les Belges à la Coupe du Monde n'est pas obligatoire. Ce qui rend cette ferveur d'autant plus réjouissante. La Belgique en a plus que jamais besoin. Peu importe la forme que prend le patriotisme.

2° « Comment peut-on se passionner pour une bande de tebés qui court derrière un ballon ? »

Celui qui sort pareil argument n’a probablement jamais regardé un match de foot. Du moins, jamais attentivement. Moi pour qui le foot se résumait jusqu'ici à Benjamin Deceuninck (pour ne pas dire Stéphane Pauwels), et à l'argument de vente fallacieux de la DH, moi qui m'y connaissais encore moins en foot qu'en cuisine (c'est dire), je me suis surprise à me passionner pour cette discipline, pour ne pas dire cet art. Non, j’exagère à peine. Bon bien sûr je parle de matchs de minimum Division 1 hein, pas de ceux du C.S. Pécrot ou du club de Couillet-Queue. Pour moi, les footballeurs sont de véritables virtuoses aux yeux bioniques, petits perles qui leur permettent de viser avec précision le pied d’un de leur coéquipier placé à l’autre bout de cette immense étendue de gazon. Moi qui parviens à foirer mon lancer de chaussette alors que je me trouve à 10 centimètres du panier de linge sale, moi qui suis la reine de l’autogoal au kicker et de la rigole au Bowling, ça me troue le luc. Pour moi, faire en sorte d'envoyer, par un tour de passe-passe prodigieux, la balle aux basques du joueur arrière (ou avant, c’est selon, allez quoi, on s’comprend), sans avoir des yeux dans le dos, c'est faire montre d'un talent fou. et d’une écoute remarquable. Les bons joueurs n’essaient pas d’être le meilleur joueur. Et c'est ce qui fait l'intelligence de nos Diâps. Je pourrais encore m’extasier à propos des dribbles envoûtants et autres « têtes » que même (surtout) un type touffu comme Fellaini maîtrise au point de faire tourner les nôtres, ou encore sur le bilinguisme de la plupart des Diables Rouges, à complexer définitivement notre bon Elio, qui finit de prouver qu’ils ne sont pas complètement demi-doux. En fait, comme cette petite dame ce matin à la radio qui se réjouissait d’ «avoir regardé un match pour voir ce que ça faisait, et avoir découvert un nouveau plaisir », moi aussi, après des années de frigidité footballistique, je me découvre une addiction pour ce sport, ses stratégies et ses rebondissements, capables de me faire tachycarder encore plus que la finale Capriati-Clijsters à Roland Garros. Et plus on regarde, plus on comprend, plus on comprend, plus on aime, plus on aime, plus on regarde, etc. Et voilà que je comprends enfin, après des années d'interrogation sur ce qui me semblait jusque-là être la plus grande imposture télévisuelle, la raison d'être des émissions de foot. J'arrive désormais à envisager qu'on puisse débattre des heures d'un match de foot sur un plateau télé, devant des types en vareuse.  Bon, j'hésite à me lancer dans un grand paragraphe dont l'angle serait "en plus de pas être cons, sont nin moches les p'tits", parce que c'est vrai que je trouve ça génial le filtre Instagram permanent que la Coupe du Monde et le talent des Diaps nous mettent devant les yeux, au point de faire passer Kevin De Bruyn pour le nouveau Beckham. Même si c'est vrai que certains sont des bias garçons, ça me fait rire que celles qui dénonçaient autrefois les coupes mulette des joueurs les élèvent tout à coup au rang de Dieux du Stade. Mais de nouveau, c'est ultra positif, ce carnaval de Rio dans la culotte. 


3° Le foot a tendance à exacerber le racisme

Je remarque effectivement que le racisme au foot peut prendre différentes formes, de la plus légère/anecdotique/condescendante/pas fait exprès (remarques, comparaisons à caractère racial qui ont toujours existé dans le sport en général; boulettes de Mathilde) à la plus sévère (lancers de bananes, blackfaces). En même temps en Belgique, l'équipe est ultramétissée et j'ai justement l'impression que cela gomme les caractéristiques raciales des joueurs. Ils sont juste belges. Certes, peut-être aurait-on affaire là aussi à une forme d'hypocrisie due à l’euphorie du moment. Bon ben j'ai rien de drôle à dire là-dessus, vous m'excusez. 

4° Les hommes deviennent (encore plus) machos et débiles et ont besoin d’exposer une virilité qui se résume à des cache-rétros  tricolores.

Et qui leur donne du coup ce sentiment d'être un peu hors-la-loi, pour ne pas dire bad boy, faisant monter leur adrénaline chaque fois qu'ils prennent la bagnole (vais-je me prendre une amende?). C’est sur que mettre des bonnets à grelots ne suffit pas à cacher la misère d’un corps ventripotant aux relents de vieux vestiaire, bien au contraire. C’est sur aussi que certains mecs ont l’art de se métamorphoser en véritables gorets tout suants, petits porcelets sous psychotropes qu’on a juste envie de griller sur le barbec avec un maïs dans la bouche. Mais certaines gonzesses tirent également leur épingle du jeu en devenant totalement hystériques (moi).  Sur l’aspect merchandising, je n’ai pas grand-chose à dire. Pour le coup, c'est pas un filtre Instagram mais noir-jaune-rouge qui est mis devant mes yeux et ma vie en permanence. J'en peux plus d'avoir mon oreiller noir jaune rouge les lendemains de match, et pourtant j'ai une addiction à ce maquillage impossible à retirer, et j'en remets, et j'en remets, et j'en remets encore. C'est vrai qu'on n'a pas l'air super fut avec ces perruques (en tout cas pour qui ne s'appelle pas Axelle Despiegelaere), mais en même temps, on est comme ça nous les Belges. On s'encombre pas de prétention. Bon je me retrouve effectivement avec des drapeaux à ne plus savoir qu’en faire (dont certains d’origine improbable : la société de Titres Services, par exemple), de quoi m’étouffer dans mon patriotisme. Et si on parle en mètres carrés de tissu, ben oui, on pourrait en habiller des nécessiteux. Vous voyez où je veux en venir mmmm ? Merchandising, consommation, gaspillage….. Terrain glissant !! Celui sur lequel ma passion naissante pour le football a failli déraper. Ben oui, bien sûr qu’y a des milliards de trucs à reprocher non pas au foot, mais à l’univers du foot. Et je sais que des gens tentent de faire preuve de créativité pour permettre à tout un chacun de combiner passion pour le foot et éthique. Pour en revenir à l’aspect merchandising, ok le principe est pas génial, ok ce n’est pas toujours du meilleur goût, mais au moins maintenant tout le monde a un drapeau et les gosses connaissent la Brabançonne avant de partir en camp (ou ne sont plus obligés de faire du scoutisme pour la connaître, c'est selon). Pour moi, le merchandising est moins dérangeant ici parce qu'il est d'abord noir-jaune-rouge avant d'être DH, Devos Lemmens ou Jupiler. On a juste l'impression que "Belgique" est un nouveau groupe à la mode ou un film qui vient de sortir, sur lequel on aurait tous bossé. 


5° « Oui alors ok, vous avez le droit d’aimer le foot, mais ne l’imposez pas aux autres quoi. En vous remerciant. »

Oh là lààààà, c’que vous pouvez être carrés du cul, vous, les antifooteux. Ben oui, le foot, c’est festif. C’est sur qu’on ne célèbrerait sans doute pas de la même manière la victoire de l’équipe gagnante du championnat international de Yathzee. C’est sur aussi qu’on ne va pas fêter une victoire en huitièmes de finale en buvant du jus de carotte ou en faisant des farandoles silencieuses. Pour les klaxons ok, je suis désolée, c'est vrai que tout le monde n'est pas provincial. Mais ce qui est topissime, c'est que les écrans géants rassemblent toutes les générations et toutes les classes sur la place publique. Un goal de la Belgique peut être capable de se faire rouler une pelle à des inconnus, dans la confusion la plus totale. On a l'impression que toute la Belgique vibre ensemble dans un grand stade. Oui, y a moyen de bien craquer son slip, c'est sur. Les matchs des Belges sont en tout cas de belles excuses pour faire la fête en semaine et pour arriver plus tard au boulot. Votre patron n'a pas à savoir que vous n'aimez pas le foot!! Mais encore mieux: ne boudez pas ce plaisir, et sautez sur ce prétexte pour venir bambouler avec nous!!



=> Oui il y a mille trucs à dénoncer dans le foot, je suis d'accord, mais que ça ne nous m'empêche pas de faire la part des choses et de jubiler, le temps d’une parenthèse. Et puis les trentenaires étaient enfants en 86 alors profitez de cette petite Madeleine de Proust :-).